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Disparition: Paul Bocuse, le pape de la gastronomie, est mort

Il a ouvert la voie à Ducasse, Robuchon, Savoy et aux autres. Avec la disparition de « Monsieur Paul », la cuisine mondiale perd sa plus belle saveur.


Il a terminé sa vie là même où il l'avait commencée ! À Collonges-au-Mont-d'Or dans sa chambre où il avait vu le jour le 11 février 1926. "Je suis perdu quand je la quitte. Lorsque je passe une nuit dans un autre lit, pour retrouver mes repères, il faut que je m'endorme avec la Saône située à ma gauche", confiait-il en mars 2013 au Point .


C'était sa bulle, son cocon, son jardin secret. À 91 ans, Paul Bocuse est parti samedi matin rejoindre d'autres étoiles. Il en aura fait briller trois sans discontinuer depuis 1965 – il avait célébré ses 50 ans de 3 macarons en 2015 ! – dans son auberge du Pont de Collonges, à côté de Lyon. "Quand je conduis l'autobus de la vie et que je me retourne, beaucoup de copains sont déjà descendus. Je ne sais pas quand je les rejoindrai", nous avait-il glissé lors d'un déjeuner avec lui en novembre 2013.

"Monsieur Paul", son surnom de toujours, restera éternellement comme la toque qui aura fait rayonner l'image de la cuisine française à travers le globe. Il prêchait la bonne parole au Bocuse d'or, ce concours d'envergure mondiale qu'il organisait depuis 1987 tous les deux ans lors du Sirha à Bron, pour exporter notre cuisine bien au-delà de ses frontières.


Il avait ainsi ouvert, en plus de ses 9 restaurants à Lyon et aux alentours, plusieurs autres affaires à l'étranger : au Japon, aux États-Unis et en Suisse. Depuis février 2013, un établissement portait son nom au Culinary Institute of America à New York. Qui mieux que lui aurait pu contribuer autant à la médiatisation "des toques" en les faisant sortir de derrière leurs fourneaux ? Personne... Il les formait même depuis 2002 dans son institut d'Écully où il accueillait à chaque rentrée en septembre plus de 450 élèves issus d'une trentaine de nationalités.


Le style Bocuse ? Immuable

Paul Bocuse aura donc passé plus d'un demi-siècle à tenir le haut de la casserole sur la planète gastronomie et à faire scintiller continuellement les mêmes plats-signatures sur sa carte. Des morceaux de bravoure comme un hommage à nos campagnes : "foie gras de canard maison en gelée au porto Antonin Carême" ; "soupe aux truffes noires VGE 1975", "salade de homard du Maine à la française" ; "loup en croûte feuilletée, sauce Choron" ; "rouget barbet en écailles de pommes de terre croustillantes" ; "filet de sole aux nouilles Fernand Point" ; "volaille de Bresse en vessie mère Fillioux" ; "gâteau président Maurice Bernachon"...


Le style Bocuse ? En un mot : immuable. Un mariage éternel à trois entre la crème, le beurre et le vin. "C'est ça la meilleure cuisine, on ne change pas une recette qui gagne", ne cessait-il de répéter. Assurément parce que la mode se démode. "Paulo" aura appliqué durant toute sa carrière la seule ligne directrice du guide culinaire d'Escoffier, "un ouvrage encore bien actuel". "En France, nous connaissons mieux le produit qu'ailleurs et en restituons des goûts plus authentiques. Nous ressemblons à un immense aquarium bordé par la mer Méditerranée, l'océan Atlantique et la Manche, et à une ferme géante avec ses volailles de Bresse, son boeuf du Charolais... Du nord au sud, nous possédons un verger infini avec un terroir inégalé. Et notre vignoble est notre plus bel ambassadeur... Aucun autre pays ne peut se vanter d'avoir une telle diversité", s'enthousiasmait-il dans un discours aux accents "cocorico".


"Pour moi, il n'existe qu'une cuisine : la bonne !"

Biberonné à l'école des Claude Maret, Fernand Point, Gaston Richard et Eugénie Brazier, Paul Bocuse aimait retrouver par-dessus tout dans l'assiette de la générosité, des pièces entières, des os et des arêtes. Autant de convictions qui l'auront incité à se placer au-dessus de la mêlée dans l'éternelle bataille entre la cuisine moderne et la cuisine traditionnelle. "Car pour moi, il n'existe qu'une cuisine : la bonne ! Qu'elle soit servie dans un cadre contemporain ou XVIIIe siècle ne change rien à l'affaire ; qu'elle soit terroir, fusion, moléculaire... non plus.


L'essentiel, c'est l'amour du travail bien fait", racontait-il au Point en arborant fièrement sur sa veste blanche son col bleu blanc rouge de MOF (Meilleur Ouvrier de France) de la promotion 1961.


"Je suis un enfant de pauvre et je vis comme un gosse riche", aimait-il clamer. Il faut croire que c'était juste pour l'art de la formule, car sept jours sur sept, Paul Bocuse accueillait au déjeuner et au dîner chaque convive à l'entrée de sa "maison" et posait volontiers pour une photo-souvenir. "Pour durer au sommet, il n'y a pas de surprise : la règle d'or, c'est le travail, encore le travail et toujours le travail", énumérait pour expliquer sa réussite celui qui disait avoir eu deux bacs dans sa vie, "un bac d'eau chaude et un bac d'eau froide".


Pour être arrivé là où il en était, il fallait incontestablement beaucoup de talent aussi... "L'important n'est pas de sortir de Saint-Cyr, mais de l'ordinaire", glissait-il amusé. Une philosophie de vie qui lui aura permis pour l'ensemble de son œuvre d'être désigné "Cuisinier du siècle" par le Gault-Millau et "Pape de la cuisine" en 1989 et "Chef du siècle" en 2011 par The Culinary Institute of America. Une sorte de "monoPaul"...


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