À peine les paupières fermées, vous vous suprenez à faire un bond de cabri dans le lit. Cette sensation de tomber dans le vide, tout le monde ou presque l'a vécue au moins une fois dans sa vie, sans pouvoir vraiment l'expliquer.
Explications du phénomène avec trois spécialistes du sommeil
Au moment de s'endormir, à chacun son petit rituel. Remonter la couette jusqu'à la bouche, frotter ses pieds l'un contre l'autre, enlacer son oreiller... Sauf que certains peuvent, parfois, avoir la désagréable sensation de tomber dans le vide.
Cette drôle d'impression a le don de faire sursauter immédiatement, jusqu'à réveiller, avec un rythme cardiaque un poil accéléré. Un mauvais rêve ? Ou un réflexe ?
Le Dr Sylvie Royant-Parola, spécialiste des troubles du sommeil et présidente du Réseau Morphée, Claire Leconte, chronobiologiste, et Christelle Peyron, chercheuse au Centre de recherche en neurosciences de Lyon, font le point sur ce phénomène.
Un décalage entre les muscles et le cerveau
Même s'il existe peu d'études scientifiques à ce sujet, comme le souligne la chercheuse en neurosciences Christelle Peyron, l'hypothèse la plus confirmée démontre qu'il y aurait un décalage entre l'endormissement du cerveau et celui des muscles, lorsque l'on passe du sommeil léger au profond.
«Quand on s'endort, il y a une perte progressive du tonus musculaire. Seulement, si ce relâchement est trop rapide par rapport au cerveau, ce dernier le perçoit comme une chute et tente de reprendre le contrôle en contractant les muscles», explique la scientifique.
En pratique, ce sursaut de l'endormissement sollicite dans un premier temps le bas du corps, puis le reste, avant de revenir à la normale. En moyenne, il dure une à deux secondes.
Plus rarement, cette brève contraction musculaire peut s'accompagner de manifestations visuelles ou auditives.
«On peut se voir véritablement en train de tomber dans un trou ou même entendre des bruits qui n'ont aucun sens avec la chute», détaille la chronobiologiste Claire Leconte.
Un réflexe de survie ?
Environ 70% de la population aurait déjà sursauté un jour dans son sommeil, rapporte Claire Leconte. Est-ce possible que cette sensation se transmette de génération en génération ?
C'est du moins ce que pensent certains scientifiques. Selon eux, ce mouvement mécanique remonterait aux temps anciens où l'homme vivait dans les arbres.
Pour survivre dans la nature, ce dernier aurait donc développé le sursaut de l'endormissement comme un réflexe de survie pour ne pas tomber pendant le sommeil.
Un raisonnement logique pour la chronobiologiste : «À l'origine, nos rythmes biologiques sont le résultat d'une adaptation des premiers êtres vivants vis-à-vis de l'environnement, de la rotation de la Terre autour du Soleil».
Carnet de sommeil
Notre société actuelle accentue la pression de sommeil et donc les sursauts Claire Leconte, chronobiologiste
Que les personnes hypocondriaques se rassurent, le sursaut de l'endormissement est totalement bénin, insiste le Dr Sylvie Royant-Parola, spécialiste des troubles du sommeil et présidente du Réseau Morphée.
La neuroscientifique Christelle Peyron le confirme : «Il n'y a pas d'impact sur le sommeil, en général, la plupart des gens se rendorment automatiquement. Certains enfants ne s'en rendent même pas compte».
Néanmoins, certains facteurs peuvent augmenter la fréquence de ces sursauts.
«Plus la personne est stressée et tendue, plus elle a de chances de revivre cette dissociation entre le contrôle moteur et cérébral», indique le Dr Sylvie Royant-Parola. Café, alcool ou tabac...
La consommation de stimulants avant le coucher pouvant jouer sur le système nerveux, amplifie également la répétition du phénomène. Sans compter sur les activités qui sollicitent le cerveau.
«À force de regarder la télévision, de consulter son portable ou de s'amuser sur la console vidéo, notre société actuelle nous pousse à décaler nos horaires de coucher et de lever. Ce qui, à terme, accentue la pression de sommeil et donc les sursauts», constate la chronobiologiste Claire Leconte.
Dans le cas où ces sursauts se répètent et développent une certaine angoisse, les activités relaxantes de type yoga ou méditation sont fortement recommandées avant le coucher.
A contrario, le sport est proscrit après le repas du soir. «En se détendant, on favorise le relâchement musculaire avant d'aller dormir et on évite de provoquer un contraste trop fort entre le corps et le cerveau», informe le Dr Sylvie Royant-Parola.
Et si vous disposez de plus de temps, la tenue d'un «agenda de sommeil» remettra les pendules à l'heure.
«On y note chaque jour l'heure d'endormissement et réveil, les périodes d'éveil et le contenu des rêves pour tenter de contextualiser et de faire le point sur ce qui cloche», propose la chronobiologiste Claire Leconte.
Si les problèmes persistent, n'hésitez pas à consulter un professionnel de santé.
Source: www.madame.lefigaro.fr