Yeux qui grattent, qui pleurent, fatigue, toux... C'est la période des allergie aux pollens ! Vous faites partie des 25% des personnes touchés ? Comment la soigner ? Quels sont les facteurs aggravants ? Quels conseils pour l'éviter ? Réponses avec le Dr Delphine Prince, allergologue.
Définition
"Les pollens sont les éléments reproducteurs mâles des plantes. Ils sont libérés pour permettre la fécondation. La pollinisation correspond quant à elle au transport du grain de pollen vers le stigmate de fleur femelle", explique le Dr Delphine Prince.
Types de pollens
On distingue deux grands types de pollens :
Pollens anémophiles (anemos, vent). Ils ont un fort pouvoir allergisant. Ils sont émis en grande quantités par la végétation et dispersés par le vent sur des dizaines voire des centaines de kilomètres. Leur petite taille leur permet de pénétrer facilement les voies aériennes. Ce sont les principaux responsables des réactions allergiques.
Pollens entomophiles (entomos, insectes). Ils sont transportés de fleur en fleur par les insectes. Ils jouent un rôle secondaire dans le déclenchement des allergies, responsables surtout d'allergies de proximité, par exemple d'allergies aux fleurs coupées ou d'allergies professionnelles.
Période de l'allergie au pollen
"Tous les pollens ne sont pas allergisants. Les différents pollens allergisants sont émis successivement dans l'air extérieur de janvier à octobre", indique l'allergologue.
Saison des pollens d'arbres
La pollinisation des arbres débute dès janvier et elle persiste jusque fin avril, parfois plus tardivement. On distingue 6 grandes familles de pollens allergisants :
Les bétulacées : bouleau, charme, aulne, noisetier
Les platanacées : platane
Les fagacées : chêne, hêtre, châtaigner
Les salicacées : peuplier, saule
Les cupressacées : cyprès, thuya, genévrier
Les oléacées : frêne, olivier, troène
"La plupart des espèces d'arbres sont présentes en quantités plus ou moins importantes dans toute la France. Certaines sont plus spécifiques du Sud de la France et du pourtour Méditerranéen : le cyprès, le platane et l'olivier", commente le Dr Prince. On pourra citer en exemple, parmi les arbres au potentiel le plus allergisant :
Le pollen de cyprès : "Il peut être présent dès décembre dans le Sud de la France où il représente la première cause d'allergies respiratoires. Classiquement, il est présent jusque fin juin. En raison de la pollinisation successive des différentes espèces de cyprès, les symptômes peuvent être présents toute l'année. Au niveau des comptes polliniques, on a pu relever jusqu'à 6000 grains de pollens de cyprès/m3. Lors de ces pics intenses, une poussière jaune se dépose sur les surfaces. On parle alors de " pluie de soufre ", remarque la spécialiste.
Le pollen de bouleau et les bétulacées.
Le pollen de noisetier : sa pollinisation peut être précoce, dès la fin janvier et courant février, en particulier s'il fait beau.
Le pollen de bouleau : Principal responsable des réactions aux pollens d'arbre dans le nord-est de la France et en région Parisienne, on peut en trouver jusque dans le sud de la France. Sa pollinisation dure plusieurs semaines entre mars et avril et il émet un nombre important de grains de pollens.
Saison des pollens graminées
Responsables du classique "rhume des foins", les graminées sont une grande famille qui comprend plus de 10000 espèces. Elles sont présentes dans toute la France. Elles poussent un peu partout, dans les prairies, en forêt, sur les bords des routes, dans les gazons, dans les champs mais aussi dans les villes. Les principaux pollens de graminées allergisants sont :
Graminées fourragères : dactyle, phléole, ivraie, pâturin, fétuque, chiendent.
Graminées céréalières : blé, orge, mais, avoine, seigle.
Graminées ornementales, plantées pour leur caractère décoratif : herbe de la pampa, fétuque, baldingère, fromental
"Les pollens de graminées sont responsables de plus de 50% des allergies polliniques et on observe la pollinisation successive des différentes espèces. Cette pollinisation survient dès mi-avril, y compris dans le nord de la France. On observe ensuite un pic de pollinisation de la mi-mai à la fin juillet, décalé jusqu'à la fin août à la montagne. De plus en plus, en raison des températures automnales plus douces, elle se prolonge jusqu'à la fin septembre voire jusqu'en octobre", précise le Dr Prince.
Allergie aux graminées : période, symptômes, que faire ?
L'allergie aux pollens de graminées se manifeste par différents symptômes. Lesquels ? Quelle est la période des graminées ? Quels traitements prendre pour se soulager ? Le point avec le Pr Christophe Dupont, allergologue.
Saison des pollens d'herbacées
Ce sont des plantes vivaces composées d'environ 50000 espèces qui se retrouvent en ville, en bordure des routes ou des chemins.
Citons la plus connue : l'ambroisie. Cette plante importée d'Amérique du Nord a d'abord proliféré dans la région Rhône-Alpes mais elle a maintenant tendance à se disséminer dans toute la France en se propageant le long des autoroutes et sur les terrains non entretenus. "Sa pollinisation débute vers la mi-aout avec des pics en septembre et elle dure jusqu'en octobre. Elle provoque des épisodes de rhinite et d'asthme très invalidants", constate la spécialiste.
Allergie à l'ambroisie : pic, jusqu'à quand, que faire ?
Les pollens d'ambroisie montent en puissance en ce mois de septembre. Il est hautement allergène, quelques grains par mètre cube d'air suffisent à déclencher une allergie. Quels sont les symptômes ? Que faire ? Quels sont les traitements ? Réponses avec le Dr Sophie Silcret-Grieu, médecin allergologue.
Symptômes
Les patients atteints de rhinite pollinique souffrent tous les ans, à la même période, des mêmes manifestations dont la durée et l'intensité peuvent augmenter avec le temps :
La rhinite allergique : les manifestations touchent le nez, la gorge, les oreilles. On observe des démangeaisons (du nez, de la gorge, du palais, des oreilles), éternuements, nez qui coule, nez bouché avec à l'extrême une perte de l'odorat. "Lorsqu'ils sont intenses, les signes de la rhinite allergique peuvent gêner le sommeil, les activités quotidiennes et être responsables d'une fatigue et de troubles de la concentration", précise l'allergologue.
La conjonctivite allergique : Les manifestations touchent les yeux. Larmoiements, yeux rouges et démangeaisons, accompagnent très fréquemment la rhinite allergique.
Asthme : une rhinite allergique pollinique peut s'accompagner d'un asthme. Près d'un allergique aux pollens sur deux présente des épisodes de toux, d'essoufflement, de sifflements, caractéristiques de la maladie asthmatique. Les patients ne réalisent pas toujours que ces symptômes sont des signes d'asthme et ne prennent pas de traitement adapté.
"N'attendez pas pour consulter : l'allergie aux pollens nécessite un diagnostic rapide. Les traitements proposés permettent de soulager rapidement les allergiques et d'éviter l'aggravation des manifestations", remarque le Dr Prince.
Médicaments pour soigner une allergie aux pollens
"Le traitement de l'allergie comprend 3 faisceaux", explique le Dr Prince :
Les mesures d'éviction consistent à éviter le contact avec son allergène. Il est difficile ici d'empêcher la végétation de polliniser.
Les traitements symptomatiques qui consistent à prendre des médicaments peuvent soulager vos symptômes. Selon les personnes, les signes peuvent être présents pendant quelques jours, voire pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois d'affilée. En fonction de cela ces traitements devront être pris soit ponctuellement soit quotidiennement, parfois même débutés avant le début de la saison pollinique. "N'hésitez pas à consulter votre médecin qui pourra choisir le traitement en fonction de vos besoins", conseille l'allergologue.
Les familles de médicaments utilisées sont :
Des traitements locaux :
Collyres : gouttes dans les yeux
Gouttes nasales : Des lavages de nez au sérum physiologique sont souvent utiles. Les corticoïdes locaux (médicaments à base de cortisone) seront utiles pour venir à bout de l'inflammation nasale.
Les décongestionnants nasaux responsables d'une accoutumance et d'un effet rebond, voire d'effets cardiovasculaires sont à éviter. A l'extrême, ils ne peuvent être pris que sur de courtes périodes et après avis médical uniquement.
Traitements inhalés de l'asthme : ils sont de 2 types :
Les traitements de la crise type ventoline, à prendre au coup par coup quand vos symptômes apparaissent.
Les traitements de fond, à base de corticoïdes souvent prescrits matin et soir, lorsque les signes d'asthme deviennent plus fréquents.
"Si vous êtes asthmatique, il est important de prendre ou de reprendre (si vous n'en avez besoin qu'en saison pollinique) votre traitement de fond tel qu'il vous a été prescrit. Si les crises persistent malgré le traitement ou si vous présentez un asthme pour la première fois, consultez rapidement votre médecin afin de mettre en place ou d'adapter le traitement inhalé", avertit la spécialiste.
Des traitements par voir orale
Les antihistaminiques : Utilisés par voies orale, ils bloquent l'activité de l'histamine, une substance chimique libérée par nos cellules lors la réaction allergique qui déclenche la réaction inflammatoire responsable des symptômes.
Les corticoïdes par voie orale : Votre médecin vous les prescrira éventuellement, pour une courte durée, si les traitements précédents ne viennent pas à bout de vos symptômes.
Les traitements déconseillés
Les décongestionnants nasaux en comprimés
Huiles essentielles en cas d'allergie au pollen ?
"En raison de leur fort pouvoir allergisant, les huiles essentielles peuvent aggraver les signes d'allergie, en particulier l'asthme", prévient la spécialiste.
Désensibilisation
"Appelé aussi immunothérapie allergénique (ITA), ce traitement personnalisé prescrit par les allergologues consiste à prendre chaque jour, sous forme de médicament une faible dose du ou des pollen(s) auquel(s) vous réagissez. Cela permet de rétablir durablement une réaction normale de l'organisme lorsqu'il au contact du pollen allergisant et donc l'absence de symptômes", explique le médecin allergologue. Possible chez l'adulte et chez l'enfant à partir de 5 ans, ce traitement peut être proposé aux patients :
Si on a identifié (avec des tests cutanés et un bilan sanguin) le ou les pollens en cause.
Si les symptômes restent gênants malgré la prise des traitements symptomatiques.
Si vous êtes dans cette situation, vous pouvez prendre rendez-vous chez l'allergologue pour déterminer l'utilité de ce type de traitement pour vous ou pour votre enfant.
Allergie au pollen et pollution
Le développement des rhinites polliniques constatées au cours de ces trente dernières années est concomitant à la progression constante de la pollution chimique.
La pollution urbaine, en particulier l'exposition aux particules diesel, aggrave la toxicité des pollens en fragilisant la surface des grains et en permettant la sortie des protéines allergisantes. Les polluants sont également des facteurs irritants qui provoquent une augmentation de l'hyperréactivité bronchique, nasale ou oculaire.
Météorologie
L'intensité de la pollinisation varie d'une année à l'autre en fonction de la météorologie et de la région. Les conditions climatiques sont déterminantes :
La chaleur et l'humidité augmentent les concentrations de pollens.
Le froid, la sécheresse, ou des pluies importantes les diminuent.
L'ensoleillement et le vent permettent la dissémination de ces grains de pollens.
"Les orages : on a constaté depuis longtemps une augmentation du nombre de personnes qui présentent des crises d'asthme juste après les orages, y compris ceux qui n'ont jamais présenté d'asthme. Les charges électriques font éclater les grains de pollens et favorisent la sortie des protéines allergisantes", ajoute le Dr Delphine Prince.
Réchauffement climatique
"Les hivers de plus en plus doux et les étés plus chauds favorisent des saisons polliniques plus précoces, plus intenses et plus longues... En montagne, la floraison progresse vers les sommets. On retrouve désormais des pollens du sud de la France
dans le nord du pays", indique l'allergologue.
Modifications du paysage
On explique aussi l'augmentation des allergies aux pollens par l'apparition massive d'espèces allergisantes dans le paysage, en particulier urbain.
La concentration en pollens dans l'atmosphère peut être telle que les allergies n'affectent plus uniquement les personnes atopiques (les personnes prédisposées génétiquement à l'allergie) mais plus largement la population générale. Ces espèces peuvent être choisies pour des raisons paysagères. On peut citer :
Le développement de l'utilisation des graminées à but ornemental.
La plantation de haies de cyprès et de thuyas, arbre peu onéreux et à croissance rapide, dans le sud.
La plantation massive de bouleaux, arbres au tronc blanc décoratif, dans les parcs urbains du nord.
Allergies croisées pollen et aliments
"L'allergie croisée est une réaction à une substance donnée chez une personne allergique à une autre substance apparentée".
Aliments végétaux et pollens présentent souvent des structures moléculaires semblables qui favorisent le développement de ces allergies croisées. Les signes peuvent être plus ou moins sévères allant du simple "syndrome oral" : démangeaisons dans la bouche ou plaques rouges qui grattent autour de la bouche à la réaction anaphylactique qui peut associer difficultés à respirer et/ou malaise ou sensation de malaise.
Dans certains cas, la protéine allergisante peut être détruite à la cuisson et l'allergie ne surviendra qu'à l'ingestion d'aliments crus.
Exemples connus : "Dans le nord de l'Europe : environ 50% des allergiques aux pollens de bouleau présentent des allergies alimentaires croisées, souvent à la pomme, à la noisette, à la pêche, et fréquemment à d'autres végétaux crus. Les réactions sont en général peu sévères et elles ne concernent que les végétaux crus. Les protéines responsables sont des protéines détruites à la cuisson de la famille des PR10", explique le Dr Delphine Prince.
Dans le sud de l'Europe : en particulier autour du bassin méditerranéen, les réactions à la pêche et à d'autres fruits à noyaux peuvent être sévères et généralisées et elles concernent aussi les formes cuites. Les protéines responsables sont des protéines de la famille des LTP, protéines présentes dans de nombreux aliments et pollens.
"Il est nécessaire de prendre l'avis d'un allergologue si vous avez déjà présenté ce type de réactions. L'allergologue pourra évaluer votre risque de présenter une réaction sévère et il pourra vous indiquer quels sont les aliments interdits ou permis et sous quelle forme", recommande la spécialiste.
Conseils pratiques pour les allergiques aux pollens
Quelques mesures de bases permettent de diminuer l'exposition :
Se rincer les cheveux le soir avant de se coucher afin d'éviter aux pollens accumulés tout au long de la journée de se déposer sur l'oreiller et de provoquer des réactions allergiques.
Porter des lunettes de soleil et un chapeau.
Ne pas se frotter les yeux.
Éviter de tondre la pelouse.
Aérer vitre domicile tôt le matin.
Éviter de fumer car le tabac aggrave les réactions allergiques.
Éviter la piscine car le chlore agresse les muqueuses du nez et des yeux.
Ne pas sécher le linge à l'extérieur.
Porter un masque lors du jardinage.
Rouler fenêtres fermées en voiture.
Évitez de pratiquer une activité physique extérieure, en particulier si vous faites de l'asthme.
Il est conseillé aux étudiants allergiques aux pollens de consulter leur médecin avant de passer les examens, car les pics de pollens surviennent en général pendant cette période.
En vacances : préférer le bord de mer car la concentration en pollens est plus faible. Éviter la montagne où la pollinisation des graminées est encore importante en été.
Source: www.sante.journaldesfemmes.fr
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