L’impression que tout part à vau-l’eau en France est tenace, mais pas toujours fondée. En tout cas, malgré la flambée actuelle du prix des carburants, il n’est pas certain qu’on soit à des records historiques.
Pour mettre les choses en perspective, nous avons comparé 3 citadines de 1981 et 3 citadines de 2021, mettant leur prix et leur consommation en rapport avec les SMIC de ces deux années. C’était mieux voici 40 ans ?
Les voitures coûtent de plus en cher, c’est un fait. La faute à des normes de pollution obligeant les constructeurs à électrifier, donc complexifier et alourdir leurs voitures, la faute aussi aux consommateurs qui veulent toujours plus d’équipements, souvent totalement inutiles, comme les tablettes. Certes. Mais a-t-on atteint un seuil empêchant d’honnêtes travailleurs de s’offrir un modèle neuf et décent ? Le prix de nos autos culmine-t-il à un pic inédit ? Rien n’est moins sûr.
On parle beaucoup de 1981 ces derniers temps, par le biais d’un évènement inédit sous la 5 République : l’arrivée au pouvoir de la gauche. Conséquence directe, l’abrogation de la peine de mort, voulue par François Mitterrand, Président de la République, et portée par Robert Badinter, Garde des Sceaux, est actée.
Deux faits majeurs qui m’ont renvoyé 40 ans en arrière, et incité à ouvrir des magazines auto d’époque. On a les pathologies mentales qu’on peut ! J’en ai profité pour me demander quelle voiture neuve on pouvait alors s’offrir avec un an de SMIC net – augmenté 4 fois en 1981 ! –, puis j’ai procédé de même pour 2021, afin de voir dans quel sens les choses avaient évolué.
En 1981, pour 40 heures travaillées par semaine, le SMIC mensuel net s’élevait en moyenne à 2 526 F (970 € actuels selon l’Insee), soit 30 314 F sur une année. Avec cette somme, on se payait notamment une Citroën Visa Spécial, une Peugeot 104 Z ou une Fiat 127 CL 5 portes, pour citer des citadines aux alentours de 30 000 F vendues en grands nombres.
Aucune de ces voitures ne permet de tenir durablement le 130 km/h sur autoroute en famille, par manque de performances (la Visa atteint péniblement le 120 km/h, la 127 le 130 km/h, la 104 frôlant le 140 km/h), voire d’habitabilité dans le cas de la Peugeot. Sans parler du bruit infernal, du manque de confort, voire de l’absence de sécurité passive.
Actuellement, le SMIC mensuel net, pour 35 heures travaillées par semaine, atteint 1 257 €, soit 15 084 € sur un an. On travaille moins et on gagne plus ! Avec ce montant, on se paye une Dacia Sandero Confort Eco-G bardée d’options, une Peugeot 108 VTI 72 Style, ou une Citroën C3 Live. Pas sûr qu’on soit perdant.
Atteignant ou dépassant toutes le 160 km/h, elles permettent de partir en vacances par l’autoroute en tenant tranquillement le 130 km/h, dans un confort parfois très bon, et en accueillant la famille (ok, dans la 108, il faudra se serrer, mais c’est possible).
Toutes disposent d’une palanquée d’airbags, d’un ABS, d’un ESP, donc proposent une belle sécurité passive. Elles reçoivent aussi une direction assistée, des vitres teintées électriques voire un ordinateur de bord. La Peugeot et la Dacia offrent même la clim ! Elle sera automatique dans la roumaine, qui gratifie également du GPS et de la caméra de recul. Un paradis prolétaire en somme.
Autre question qui se pose durement à l’heure actuelle : le prix des carburants. Il flambe depuis quelques semaines. En 1981, le litre de Super s’élevait à 4,12 F, soit 1,58 € actuels. A rapporter aux 15,90 F/h du SMIC : en 1 h de travail, on peut acheter 3,8 l d’essence. Certes, l’ordinaire restait à 3,91 F (1,50 €) mais toutes les voitures ne l’acceptaient pas.
Ces derniers temps, le litre de sans-plomb 95 E10, adapté à 99,99 % des autos, atteint pratiquement 1,64 €, soit un niveau qui nous paraît critique, mais pas tellement plus élevé finalement qu’en 1981. Comme on gagne 8,32 €/h, en 1 h de travail, on peut acheter 5,0 l d’essence : c’est 1,2 l de plus qu’en 1981. Tout ne va pas si mal, n’en déplaise à certains déclinistes, de droite et de gauche, qui ne cessent de se lamenter sur les plateaux de télévision !
On croit souvent autos actuelles consomment moins. Ce qui ne se vérifie pas avec celles-ci, du moins sur route. La 104 Z ne dépasse pas les 5,8 l/100 km, la Visa s’en tient à 6,1 l/100 km, la 127 atteignant 6,8/100 km. La Dacia Sandero tourne plutôt à 7,0 l/100 km, la C3 reste à 5,8 l/100 km et la Peugeot s’établit à 5,4 l/100 km. Etonnant, non ?
Il faut pondérer en disant que les modernes sont beaucoup plus performantes, du fait d’une puissance très supérieure (de 72 à 100 ch pour notre sélection, contre 35 à 50 ch pour les anciennes) qui compense très largement un poids plus élevé de 100 à 300 kg en moyenne. De surcroît, la Dacia peut brûler du GPL, à 0,85 €/l, et on peut toujours convertir les autres à l’E85 (0,80 €/l). Donc, on peut se déplacer pour bien moins cher qu’en 1981 dans des conditions autrement meilleures, en matière d’agrément, de confort et de sécurité. Si, si !
Je suis le premier à adorer conduire de vieilles bagnoles (oui, je roule souvent dans une Fiat Uno de 1987), mais ça n’a rien de rationnel. En fait, même si je peux, comme beaucoup, verser dans quelque nostalgie, j’évite de regarder le passer avec des lunettes roses. Avant, ce n’était pas mieux, ni pire, juste différent.
Source: www.caradisiac.com
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